L’installation d’un Chirurgien-Dentiste libéral ou la reprise d’un cabinet dentaire impose une réflexion particulière quant à la manière d’acquérir le droit de présentation de clientèle ou le matériel nécessaire à l’exploitation. Ce choix est un choix à long terme qui peut avoir des conséquences importantes sur l’enrichissement de l’entreprise et sur l’augmentation du patrimoine du Chirurgien Dentiste concerné.
Deux possibilités s’offre à vous afin d’exercer votre profession libérale :
- soit en tant qu’entreprise individuelle
- soit en tant que société d’exercice libérale.
Ces deux types d’activités présentent des avantages et des inconvénients qu’il est nécessaire de bien appréhender afin de faire un choix adapté en fonction de votre situation.
Le Chirurgien-Dentiste est alors considéré comme le chef de l’entreprise individuelle. Cette dernière sera soumise fiscalement aux BNC (bénéfices non Commerciaux). Le résultat de l’entreprise sera donc déterminé par la différence entre les encaissements d’honoraires et les charges décaissées nécessaires à l’exploitation.
Le résultat ainsi déterminé servira d’assiette aux charges sociales, à la CSG-CRDS et à l’impôt sur le revenu. Dans ce cas il est nécessaire de ne pas confondre le bénéfice imposable et le bénéfice disponible. En effet, une partie du bénéfice devra être utilisé notamment au remboursement des éventuelles dettes liées à l’acquisition d’un droit de présentation de clientèle, par exemple.
De ce fait, dans un certain nombre de cas le Chirurgien-Dentiste se trouve donc soumis à charges sociales, CSG – CRDS, et à l’impôt sur le revenu sur un résultat non disponible.
D’autre part, au niveau juridique, le cabinet fait partie du patrimoine personnel de l’exploitant et les dettes contractées sont donc totalement opposables à l’exploitant voire à son conjoint si le régime matrimonial est une communauté.
Il peut donc y avoir dans ce cas confusion des patrimoines et des dettes professionnels et personnels.
La société d’exercice libérale (SELARL) est une personne morale qui va se porter acquéreur soit du droit de présentation de clientèle soit des biens matériels nécessaires à l’exploitation.
Dès qu’il y aura exploitation en commun entre deux professionnels devra se poser la question de la société d’exercice libéral.
C’est une entité juridique distincte qui sera représentée dans le patrimoine de l’exploitant ou gérant par les parts sociales qu’il possède en contre partie des capitaux apportés dans la société .
Cette typologie d’exploitation a déjà le premier avantage de séparer juridiquement le patrimoine personnel du patrimoine professionnel.
D’autre part, la société aura une comptabilité propre. Elle comptabilisera les honoraires et les charges d’exploitation. La rémunération du professionnel se fera sous forme d’appointement de gérant.
Le résultat final sera lui-même imposé à l’impôt sur les sociétés.
Cet impôt est de 15 % jusqu’à 38 200 € et 33 % 1/3 au-delà.
Ce résultat s’il n’est pas distribué n’est pas assujetti, ni à la CSG, ni sur les cotisations sociales, ni sur l’impôt sur le revenu.
De ce fait, ce résultat est conservé dans l’entreprise et aura pour fonction soit de rembourser de la dette soit de capitaliser en vue d’investissements futurs. Ce résultat subi une fiscalité et une charge sociale très réduites par rapport à une exploitation individuelle.
Cette situation, contrairement à l’exploitation en société individuelle permettra une liberté d’arbitrage entre appointement de gérant, capitalisation dans l’entreprise, et/ou distribution de dividendes. Alors que dans l’entreprise individuelle aucun arbitrage n’est possible et la totalité du résultat disponible ou non est taxé à l’impôt sur le revenu, à la CSG et aux charges sociales.
Exemple :
Le DR BERTHIER est associé et exerce en BNC, donc pas de distinguo entre son patrimoine personnel et professionnel, de même entre bénéfice du cabinet et ses revenus. Qu’il décide de faire des travaux dans sa résidence principale ou d’acquérir un nouveau poste de traitement pour son cabinet, les sommes investies seront ponctionnées de la même façon.
Avec des charges sociales personnelles de l’ordre de 35% et un taux marginal d’imposition de 41% par exemple, le disponible net, s’en trouvera sensiblement réduit.
Ce même praticien aurait pu constituer une SELARL avec son associé pour exercer leur activité, avec en résumé les flux financiers suivants :
Chiffre d’affaires : 600 000 €
Rémunération Gérance DR BERTHIER : 110 000 €
Rémunération Gérance Associé : 110 000 €
Achats : 120 000 €
Charges du cabinet : 220 000 € y compris charges sociales des gérants
Bénéfice avant impôts : 40 000 €
La société dégageant un bénéfice de 40 000 €, le calcul de l’Impôt sur sa Société (IS) s’établit de la façon suivante :
- 15% de 38 200 € : 5 730 €
- 33,33% de 1 800 € : 600€
D’ou un impôt à devoir au titre de l’IS de 6 330 €.
Après paiement de l’IS, la société à donc à disposition la somme de 33 670 € qui pourrait lui servir par exemple à acquérir un nouveau matériel, hors impôt sur le revenu et charges sociales. Les associés pourraient aussi laisser ces sommes s‘accumuler dans les comptes de leur société pour se donner une plus importante capacité d’investissement futur.
A comparer avec le solde net en BNC qui serait de 15 340 € *
*40 000 x 0,65 pour charges sociales de 35% = 26 000 €
26 000 € x 0,59 pour impôt sur le revenu = 15 340 €
La SEL peut être aussi un excellent outil de transmission entre un jeune diplômé et un praticien expérimenté, en conciliant un lancement d’activité dans un environnement stable pour le premier, et une diversification de sources de revenus pour le second.
Enfin le praticien a quelques années de la retraite aura plus se souplesse pour céder progressivement son cabinet dans le cadre d’une SEL.
Exemple :
Le DR Berthier à créé il y a quelques années sa Société d’Exercice Libérale évaluée à 150 000 €. Le matériel (sièges, radiographie, unités de soins…) sont encore de très bonne facture et ne nécessitent pas d’être remplacés sur les 5 années à venir.
Il a ses trimestres pour faire valoir sa retraite à taux plein, et veut cesser son activité dés que possible. Il a depuis quelques mois un jeune collaborateur qui est intéressé pour reprendre son cabinet. Ce dernier très prudent ne veut pas racheter en bloc le cabinet, et veut une transmission « assistée » et progressive.
Son ainé lui propose de réduire la valeur des parts de la SEL de 20%, et d’acquérir dans un premier temps 60% des parts, le solde sera acquitté durant les cinq prochaines années. A travers un pacte d’associé le jeune praticien s’engage à avoir une rémunération de gérance plafonnée et à distribuer l’ensemble des bénéfices sous forme de dividendes.
La SEL dégage chaque année 20 000 € (après impôts sur les sociétés) et le DR BERTHIER perçoit alors 8 000 € de dividendes (avant prélèvement sociaux et impôts sur le revenu), et cédera au fur et à mesure les parts restantes de la SEL par tranches de 10% chaque année.
Cette présentation montre que l’on ne peut pas déterminer de règles générales qui permettraient de définir un choix. Chaque situation sera différente, car les particularités seront liées :
- A la situation familiale
- Aux revenus du couple
- Au projet d’entreprise : exploitation seul ou à plusieurs ?
- Au niveau du chiffre d’affaires estimé
- Au coût engendré par l’ensemble de la mise en place de ces solutions
- Au niveau des investissements en matériels, en droit de présentation de clientèle.
Ces différentes particularités nécessitent la mise en place d’une étude spécifique à chaque situation. Cette étude mettra à jour un comparatif exhaustif des deux situations.
L’expérience nous montre qu’il est nécessaire pour que la mise en société soit pertinente que le bénéfice prévisionnel de l’exploitation soit au moins de 120 000 €.
L’effet de levier le plus important demeure le cas où il y a acquisition d’un droit de présentation de clientèle.